Notre réflexion sur les enjeux de l’après-crise

30 avril 2020, par Francis Gagné

Avec plus de la moitié de l’humanité toujours en confinement, l’ampleur du ralentissement économique actuel est sans précédent… Selon nous, s’il n’en avait été de l’intervention rapide et massive de nos gouvernements, les conséquences de la crise actuelle se rapprocheraient de celle de la grande dépression de 1929.

 

Dans ce contexte, peut-on en vouloir à nos instances gouvernementales de dépenser sans compter pour éviter le pire ?

 

Cet ouvrage tend à démontrer que les règles du jeu changent et s’interroge sur les conséquences et répercussions de cet afflux d’argent sur l’après-crise.

L’une des leçons que nous pouvons déjà tirer de cet influx monétaire massif est qu'il n'y a plus de limites à l'action des banques centrales. Autrement dit, il n’y a plus de limites à se montrer créatif pour sortir l’économie du trouble. Comme lors d’un de nos derniers courriels, nous avons joint un texte supplémentaire en p. j. pour approfondir les sujets de « créativité et d’expansion du bilan d’une banque centrale ».

 

Il est important de faire la distinction entre les pouvoirs et les responsabilités d’une banque centrale versus ceux d’un gouvernement élu.

 

Si une banque centrale a (normalement) certains pouvoirs et responsabilités, dont celui « d’imprimer de la monnaie » en quantité raisonnable en plus d’un pouvoir discrétionnaire sur les taux d’intérêt dans le but favoriser la stabilité à long terme du marché financier d’un pays, il en est tout autre pour les gouvernements. En effet, un gouvernement n’a pas (normalement) les mêmes pouvoirs et donc ne peut pas (normalement) faire ce que la banque centrale a la responsabilité de faire.

 

Il en est ainsi (normalement) pour éviter que les envies à court terme d’un gouvernement élu ne viennent déstabiliser la santé financière d’un pays à long terme. Gardons à l’esprit qu’un gouvernement ne peut pas directement imprimer de l’argent pour couvrir ses dépenses. Il se doit de l’emprunter et qui dit emprunt, dit taux d’intérêt et date d’échéance.

 

Pour ceux qui ne l’auraient pas remarqué, le président des États-Unis, M. Trump, ne fait pas les choses comme ses prédécesseurs! 😉 Blague à part, à mainte reprise ce dernier a fortement incité (voir dicté) à la FED (banque centrale américaine) d’abaisser les taux d’intérêts américains, et ce, dans le but de permettre à son gouvernement de se financer à meilleur coût et donc de lui permettre d’emprunter potentiellement encore plus.  

 

Dans cette introduction, nous ne remettons pas en question la capacité des banques centrales à maintenir les taux d’intérêt près de 0% ; nous le tenons pour acquis!

 

Vous noterez qu’à maintes reprises nous avons utilisé le mot (normalement) entre parenthèses pour signifier que la « normalité » a radicalement changé depuis peu. Dans les faits et de façons officieuses, cette normalité a changé le jour de l’élection de M. Trump, selon nous. Son style de gestion frôlant l’intimidation; prêt à éjecter tout administrateur public qui ne répond pas à ses critères a fini par mettre au pas des instances sensées être objectives et sans partisaneries politiques comme la FED.

 

L’arrivée de crise sanitaire actuelle pousse encore plus les banques centrales à se dénouer les mains. Dans un discours de Monsieur Jerome Powell, président de la FED, le 9 avril dernier, ce dernier a déclaré que :

   « Le rôle de la banque centrale dépasse désormais le seul maintien de la liquidité et du bon fonctionnement des marchés, et qu'il consiste aussi à assurer aux États-Unis qu'il dispose des moyens économiques et financiers de faire face à l'urgence sanitaire. »

[…]

   « Nous continuerons à utiliser ces capacités avec force, de manière proactive et agressive, jusqu'à ce que nous ayons la conviction d'être solidement engagés sur la voie de la reprise », a-t-il ajouté.

Dans ce contexte, il nous faut reconnaître que les règles ont radicalement changé et que nous vivrons dorénavant dans un modèle économique où les gouvernements, avec l’aide de leur banque centrale, vont user plus que jamais de tous leurs outils pour maintenir artificiellement les taux d’intérêt très bas et ainsi s’assurer d’offrir un accès illimité, au crédit du gouvernement en place. Il n’est pas exclu non plus que de nouveaux outils, encore jamais vus, soient créés pour assouvir ce désir.

 

À ce stade, nous pensons pouvoir prédire qu’il y aura certainement un avant et une après-crise.

 

Dans la mesure où les banques centrales, sous prétexte de crise sanitaire, de ralentissement économique ou d’urgence environnementale, s’octroient une latitude quasi infinie pour créer de la monnaie pour s’assurer d’atteindre leurs objectifs, il devient probable que le risque le plus grand pour l’investisseur ne soit plus la faillite du système, mais plutôt l’inflation!

 

Pour comprendre notre raisonnement, il faut se placer dans la peau d’un investisseur qui réalise et accepte le principe suivant : les gouvernements auront un accès quasi infini à des emprunts très peu coûteux, de par le fait que les taux d’intérêt sont désormais proches de 0% et surtout que leur banque centrale acceptera de créer de la nouvelle monnaie pour lui acheter cette dette.

 

En tant qu’investisseur, quelle valeur donnerez-vous à une monnaie si sa banque centrale en crée de la nouvelle sans grande retenue ? Quelle proportion de vos actifs serez-vous disposés à investir dans une obligation gouvernementale qui rapportera aux environs de 0% ?    

Poser la question revient à y répondre.

 

Les investisseurs chercheront à acquérir d’autres types d’actifs, qui idéalement auront la capacité de générer des revenus fiables et indexés à l’inflation. Par exemple, des actifs réels comme des immeubles, de l’infrastructure, ou tout autre actif ayant la capacité actuelle (ou future) de générer un revenu supérieur à l’inflation, ce qui inclut les actions de qualité.

 

Si ce que nous venons de décrire se produit, il est probable que les actifs les plus recherchés prennent de la valeur, le tout engendré par une liquidité et une demande accrue dans le marché. Notons que ce ne sera pas tous les actifs qui seront impactés de la même façon, d’où l’importance pour nous de savoir séparer le bon grain de l’ivraie.

Pour ceux qui s’inquiètent du volume astronomique de dette qui résultera de cette crise, sachez que c’est l’inflation elle-même qui sera le meilleur, voire le seul, outil efficace pour la « banaliser ». Toutefois, cette réalité n'est possible que dans la mesure où l'inflation croît plus rapidement que la dette.

 

Ce courriel ne prétend pas prédire l’avenir avec certitude et une grosse mise en garde en bas de page vous rappellera que ceci n’est que notre point de vue. Mais si vous pensez comme nous que les taux d’intérêt seront contraints de rester très bas, très longtemps, nous espérons vous avoir apporté des outils de réflexion utiles!! C’est le principal objectif de ce genre de courriel.

Concrètement pour vos portefeuilles, cela veut dire que nous avons un biais défavorable envers les dettes d’État à long terme et un plus favorable envers les sociétés immobilières et les actifs tangibles qui ont la vertu de croître avec l’inflation. Le contexte actuel de crise lié à la COVID-19 ébranle les marchés, crée de l’incertitude à court terme et laissera assurément de lourdes séquelles sur l’économie et la société. Mais à long terme, il nous apparaît que l’inflation est le plus important risque contre lequel nous devons nous prémunir.

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Les opinions exprimées ici sont celles de l'auteur à la date de publication et sont susceptibles d'évoluer sans préavis. Chaque équipe de gestion de portefeuille peut avoir des points de vue divergents et prendre des décisions d'investissements différentes pour divers clients. La Financière Banque Nationale – Gestion de patrimoine (FBNGP), par l'entremise de son stratège en chef Stéphane Marion, propose un point de vue différent. Voici sa dernière évaluation de la situation https://www.fbngp.ca/documentation/publications-financieres.html (voir l’Hebdo économique).

 

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